Des hommes en arme, des tonneaux mousseux, des femmes et des plaisirs, il était donc bien arrivé au cœur de ce repère de brigands qui avait fait sa réputation au grès des vents et des voyages. Les lieux avaient peu changé, l’esprit semblait demeurer le même. Mais les vieux, les anciens, ceux qui avaient fait leurs armes brillaient par leur absence. Surement d’autres affaires à régler en des temps de retraites bien méritées. Cela pouvait se comprendre, chacun avait le droit à un peu de repos au cours de sa brève existence. Même les brigands, surtout les brigands.
Les hommes qui fixaient les limites et l’autorité du lieu désormais étaient aussi robustes que Couloulou, Sanctus, Tumu ou Leroy en leurs jeunesses. Seulement quelque chose de l’esprit, de la spiritualité semblait s’être quant à lui égaré sur le chemin de la propreté et de l’ordre. Il était un temps ou chacun pouvait trainer ou bon lui semblait, sans s’en excuser, sans se soucier de sa manière de parler ou de s’accommoder. Il était un temps ou les marauds se comportaient en tant que tels en ces lieux. Il était un temps ou les prestances, les règles et les conventions ne faisaient aucune autorité. Un temps ou l’esprit était celui du bordel, de l’anarchie, de la détente, des évasions, des défis de l’autorité et des grands projets. Un temps perdu lui aussi en chemin.
A l’angle d’une ruelle, un gamin se précipite tel un chien agard :
Doucement gamin, tu pourrais trébucher…
L’homme s’approche d’un carrefour, le mire quelques temps, en large et en travers puis finit par s’y poser. Adossé à un mur, il attend. Il aimerait voir des compagnons se joindre à lui pour quelques combats, faits d’armes et autres aventures dans la région du Maine.
Ah, mais à quoi pensait il ? Comment pourraient ils le deviner ? Comment pourraient ils savoir ce que l’inconnu attendait ?
Il sortit donc de sa besace un écriteau sur lequel figurait en grosses lettres « Recherche branleurs pour débesacer passants dans le Maine. Aucune qualification requise. »
Béh oui, faudrait tout de même pas qu’on le prenne pour un fou. Avec ces branleurs de juges crasseux qui rodent, on se ferait vite accuser de folie. Et puis, c’est bien connu que les fous deviennent vite des sorciers en période d’ennui. Ce genre d’histoire, ca finit souvent autour d’un feu et d’un bout de viande grillé, même chez les brigands à ce qu’il paraît ces derniers temps.
Voilà, ainsi il n’apparaitrait pas comme fou, et on lui fouterait la paix.
Le gamin se repointe, s’arrête à quelques pas de l’homme assis sur la place et le fixe.
Me fait pas chier gamin.
L’enfant disparaît dans l’inconnu qui est son monde.
Sujet: Du monde dans le coin du Maine? 